Pourriez-vous dresser le portrait de votre PPRT ?
La zone industrielle de Port-Jérôme s’étend sur 6 communes : Lillebonne, Notre-Dame-de-Gravenchon, Saint-Jean-de-Folleville, Petiville, Saint-Aubin-sur-Quillebeuf et Quillebeuf-sur-Seine. Les risques générés par 6 établissements Seveso seuil haut sont à l’origine de ce PPRT commun, prescrit le 29 mai 2009. Il s’agit d’Esso SAF, ExxonMobil Chemical France, Lanxess Elastomères, Primagaz, Téréos et Cabot France.
Votre PPRT prévoit des recommandations de travaux. Quelle est la position de votre collectivité ?
Sur Notre-Dame-de-Gravenchon, nous avons environ 1 200 habitations en zone de recommandations (toxique et surpression). Si la protection contre les effets toxiques est relativement simple et peu coûteuse, celle contre la surpression l’est moins.
Nous ne voulons pas laisser seuls les propriétaires qui voudraient réaliser des travaux de renforcement de leur bâti. C’est un sujet complexe et nous voulons leur éviter de se faire gruger par des entreprises peu recommandables. Nous allons donc leur proposer un accompagnement technique, avec des conseils pour leur permis de construire et la réalisation de diagnostic, une liste d’artisans qualifiés que nous connaissons, et un accompagnement administratif pour monter des dossiers d’aide au financement et l’octroi de prêt à taux zéro. Pour rationaliser tout ceci avec les économies d’énergie, nous allons aussi travailler conjointement avec le conseiller du point Info-énergie qui deviendrait aussi conseiller PPRT.
La délibération souligne la complexité du règlement et la nécessité d’accompagner les services instructeurs.
Effectivement, nous avons demandé à notre service instructeur de lire le projet de règlement. Sa conclusion est que ce texte, qui se veut être un document d’urbanisme, est malgré tout complexe, technique, et inhabituel pour eux. C’est pourquoi nous demandons au Préfet un accompagnement.
Notre service instructeur travaille déjà en partenariat avec les services de la DDTM. Par exemple, nous menons actuellement un projet de réhabilitation du centre-ville ; nous faisons régulièrement appel à eux, je dois dire qu’ils nous accompagnent très volontiers dans notre travail. Une fois le PPRT approuvé, nul doute qu’ils continueront de nous épauler, et nous avons voulu le mentionner dans notre délibération, l’idéal étant que le Préfet permette à la DDTM de former les services instructeurs et les conseillers PPRT.
Dans votre délibération, vous faites référence à un texte spécifique à la zone industrielle de Port-Jérôme. Qu’en est-il ?
Pour les industriels regroupés en association (AEPJR), l’application de la loi posait des soucis de développement de l’activité industrielle, voire même de maintien. Du côté des collectivités, notre préoccupation concernait le développement, voire le maintien de l’emploi et les retombées fiscales. Nous avons décidé de créer un groupe de travail accompagné par les services de l’Etat (Préfecture, DREAL et DDTM) qui nous ont apporté leur expertise. Il aura fallu une centaine d’heures de réunion et de négociation pour aboutir à un projet de règlement, autoporteur et consensuel. Les contraintes dures étaient adoucies, en contrepartie d’une sélection drastique du type d’activité pouvant s’implanter sur chacune des zones PPRT, et de mesures constructives et organisationnelles imposées aux nouveaux porteurs de projet.
Comment avez-vous intégré la circulaire du 25 juin 2013 qui concerne l’organisation de la gouvernance de la sécurité ?
Cette circulaire est une aide précieuse pour la gestion de la sécurité sur les plateformes. Cependant, les entreprises de la zone industrielle de Port-Jérôme sont indépendantes juridiquement et concurrentes pour certaines. Elles ont donc considéré que la circulaire ne pouvait pas s’appliquer à eux telle quelle. La négociation dont j’ai parlé plus haut a permis de relaxer ses contraintes tout en restant dans l’esprit du PPRT.
Elles sont toutes d’accord pour partager leurs retours d’expériences, organiser des exercices en commun, partager les meilleures pratiques relatives à la protection des personnes, mais elles ne veulent pas que leur « voisin » mette un œil dans leur jardin.
C’est d’ailleurs le paragraphe qui a suscité les discussions les plus animées entre l’État et les industriels. C’est sa dernière version qui figure dans les délibérations. Elle est consensuelle et devrait figurer dans le règlement, du moins nous l’avons signifié ainsi au Préfet.
On a le sentiment que la fermeture d’une route départementale pose des problèmes. Quels sont-ils ?
La route départementale RD110 coupe le site d’ExxonMobl en deux, et relie Notre-Dame-de-Gravenchon au bac de Quillebeuf. Un comptage a été mené pour définir qui emprunte cette route : 75% des utilisateurs se rendent dans les entreprises riveraines.
Le projet de règlement de PPRT prévoit donc de fermer cette route au transit. Seuls les travailleurs pourront emprunter cet itinéraire. Sur le plan sécurité, des barrières dynamiques fermeront les entrées de la zone en cas de problème. 3 questions se posent néanmoins :
> Premièrement, le département, actuel gestionnaire de cette route, pense que, dans ce cas, sa compétence n’est plus avérée et souhaite la transférer à la Communauté de communes. Quelles sont les responsabiltés et les conséquences d’un tel changement ? C’est une question que nous avons fait figurer dans notre délibération.
> Deuxièmement, pour les transports exceptionnels, c’est la seule voie possible pour traverser le secteur. La capacité des ouvrages d’art à les supporter n’est pas démontrée sur les autres routes alentours. Des études sont en cours pour vérifier ce point.
> Troisièmement, une piste cyclable relie actuellement la ville de Notre-Dame-de-Gravenchon au bac de Quillebeuf qui traverse la Seine. En fermant cette portion de route, il faut dessiner un autre itinéraire cyclable, contournant la zone industrielle. Le trajet devien alors plus long, et une des deux voies de ce contournement très fréquenté n’est pas sécurisée. Des travaux importants devront être engagés pour cette partie, l’autre n’étant qu’à aménager. Là aussi nous avons porté ce point à l’attention du Préfet dans notre délibération.