En 1966, lorsqu’une sphère de stockage de gaz explose à Feyzin, Internet et les réseaux sociaux n’existent pas. Il faut attendre les premiers reportages radio, puis télé le soir, pour que les français apprennent la catastrophe.
50 ans plus tard, le 28 juin à 11h50, toujours dans la vallée de la Chimie, un feu s’est déclaré sur un site Seveso à Saint-Fons. Rapidement, des images sont diffusées sur les réseaux sociaux.
50 ans plus tard, la circulation de l’information s’est donc… « accélérée ».
AMARIS appelle une réflexion sur l’information publique d’urgence et la diffusion, aux collectivités, d’outils leur permettant de se saisir de cette problématique.
Top chrono – la diffusion de l’information entre 12h et 14h
A 12h15, un automobiliste circulant sur l’autoroute filme le nuage de fumée et le diffuse au monde entier via l’application périscope. Les premiers tweets et images des fumées circulent sur les réseaux sociaux. Plusieurs posts sont publiés sur les comptes facebook d’habitants de l’agglomération, immédiatement partagés et commentés. La presse reprend l’information : un
article du Progrès est mis en ligne à
12h37 (à 14h30, cet article totalise plus de 50 400 vues).
Les communes concernées réagissent chacune de leur côté.
A Feyzin, le serveur d’appel téléphonique est lancé à 12h40 pour demander le confinement dans les bâtiments publics puis pour avertir les habitants inscrits dans la base de données. A 12h54, un communiqué officiel est en ligne sur le site de la ville puis sur son mur Facebook. A Saint-Fons, la mairie répond aux questions des habitants sur sa page facebook.
La Préfecture diffuse des informations à partir de 13h.
A 13h09, le compte twitter du préfet (4 539 abonnés) explique « Incendie Blue Star Sillicone : feu de produits finis dans un local de stockage. L’entreprise a déclenché son Plan d’opération interne ». La seule préconisation de ce fil sera destinée aux automobilistes à 13h28.
A 13h50, l’incendie est maîtrisé par les pompiers. La préfecture communique par twitter, les mairies sur leurs pages facebook et/ou site internet. Les commentaires sont nombreux mais dispersés. Certains se félicitent d’avoir été alerté par téléphone, d’autres regrettent de n’avoir pas reçu de SMS.
A 22h00, la recherche google “incendie usine Saint-Fons” recueille 16 200 résultats.
5 constats
1
Désormais, l’information se diffuse aussi vite que la vision. L’information officielle, validée et certaine, sera toujours en retard.
2
L’analyse qualitative et quantitative de la diffusion de l’information via les réseaux sociaux nécessite des compétences que les collectivités publiques n’ont pas toujours. Elles connaissent mal l’impact de leurs tweets et messages facebook. Cette analyse permettrait pourtant de mieux comprendre les phénomènes de diffusion.
3
Cet accident s’est produit sur le territoire d’une métropole, à la frontière de deux communes (Saint-Fons et Feyzin). Avant le déclenchement du PPI, les sources d’information sont multiples et ne sont pas forcément coordonnées. La question du partage des bases de données des personnes à informer est criante.
4
Concernant les outils d’alerte, l’utilisation des serveurs d’appel/texting est entrée dans les mœurs. Mais son efficacité dépend entièrement des bases de données et donc de l’inscription volontaire des habitants. Les outils sophistiqués d’alerte par application smartphone n’ont pas été utilisés.
5
Les collectivités publiques commencent à utiliser les réseaux sociaux, mais elles en ont une maîtrise « variable » et les messages ne sont pas toujours coordonnés entre collectivités.
Engager une réflexion sur la diffusion de l’information publique d’urgence
La question de la diffusion de l’information publique d’urgence dans un monde de réseaux sociaux est récente. Elle s’est formalisée, au début des années 2000, avec l’apparition du concept de SMEM (Social Media Emergency Management) ou sa traduction française de MSGU (médias sociaux en gestion des urgences). Quelques agences de communication spécialisées travaillent sur ce sujet.
Mais elle n’a pas donné lieu à un guide de bonnes pratiques validées par les pouvoirs publics.
Amaris appelle une réflexion avec l’État sur l’information publique d’urgence et à la diffusion auprès de chaque collectivité publique d’outils permettant de se saisir de cette problématique.