Aujourd’hui, Pascal Mallet, Chef de service Risques majeurs – Résilience des territoires – Le Havre Seine métropole, nous présente son expérience autour des enjeux du débat « PPRT : bilan et perspectives« .
La Zone Industrielle et Portuaire du Havre est probablement l’une des zones à risques françaises dont la mise en œuvre du PPRT est la plus avancée. Parce que celui-ci a été validé très tôt, mais surtout parce que les acteurs locaux ont su trouver des solutions inédites aux difficultés qui bloquent la plupart des autres sites. Et cette expérience vaut d’être partagée.
À bien des égards, la ZIP du Havre est un cas hors normes : par la surface de sa zone PPRT (27 km de long sur 5 de large), le nombre de sites Seveso qu’elle accueille (23 dont 16 seuil haut), et les quelques 1200 établissements et 31 000 emplois concernés. Mais elle est aussi à part en raison de sa gouvernance, de son histoire et de l’état d’avancement de son PPRT, approuvé dès 2016.
En effet, dès le début des années 2000, et avant le démarrage des PPRT, les industriels s’étaient regroupés en association (www.ormes.fr) pour envisager collectivement la gestion des risques sur le site. Et déjà, les collectivités membres-fondateurs de l’ORMES, les acteurs institutionnels et mêmes les riverains étaient associés aux discussions et décisions. Ces habitudes de travail en commun se révèlent un facteur clé pour que le PPRT soit tout simplement mis en œuvre.
Renforcer les leviers
Le contenu du PPRT définit un ensemble de mesures qui doivent s’appliquer sur les habitations, les biens des activités économiques et les infrastructures. Mais pour être mises en œuvre, celles-ci doivent être entièrement financées. C’est le point clé, que ne prévoient pas les PPRT actuellement. Au Havre, nous nous sommes appuyés sur cette gouvernance multipartites pour construire des dispositifs de financement complémentaire et assurer une bonne compréhension de la chaîne d’acteurs jusqu’au Trésor public. Et ce, au prix d’un investissement important en ingénierie administrative et financière pour les collectivités. Pour exemple, l’avance du crédit d’impôt pour les riverains est évidemment problématique. Ici, ils bénéficient d’une avance faite par la Ville. Autre exemple, les biens soumis à des mesures foncières sans droit réel. Une partie du périmètre PPRT est situé sur le territoire du port. Les acteurs économiques ne sont la plupart du temps ni propriétaire, ni détenteur de droits réels. Et donc ils ne bénéficient d’aucun financement. Pour nous, il était impensable de ne pas les accompagner, ne serait-ce que pour sécuriser les emplois et l’écosystème local. Nous avons donc travaillé avec toutes les parties prenantes à des solutions et à relocaliser ces entreprises sur notre bassin d’emplois.
Faire tomber les silos
L’un des constats réalisés sur le territoire havrais comme sur les autres, outre le financement, réside dans la difficulté d’aborder les risques industriels de façon globale sur un même territoire. Ils sont presque systématiquement pensés en zones distinctes, sur lesquelles l’on multiplie les dispositifs : PPRT, autres servitudes d’utilité publique, porter à connaissance….
Ainsi, la prévention sur les infrastructures de matières dangereuses est gérée de façon complètement différente des PPRT, sans financement et prescription sur l’existant. Il apparait donc indispensable d’avoir les mêmes règles applicables de façon globale. Nous sommes sur les mêmes périmètres, les mêmes risques.
Cet enchevêtrement de dispositifs peut compliquer la mise en œuvre d’une approche cohérente et éloigne de l’objectif recherché. C’est pourquoi la coordination des acteurs phares du territoire est indispensable et se doit d’être organisée au sein d’une gouvernance collective de gestion de risques. Comme évoqué en introduction, les acteurs du territoire havrais se sont organisés depuis plus de 20 ans pour permettre une meilleure transversalité et l’aboutissement de dispositifs efficaces et coordonnés.
Pour aller plus loin, il n’y aucune raison pour que les risques – tous risques confondus – ne soient pas appréhendés globalement. En tant qu’aménageurs, les collectivités ont besoin d’une approche intégrée et multirisques (naturels et technologiques). Pour éviter les incohérences, trouver des synergies, fixer des priorités, il faut faire tomber les silos.
Enfin, les dispositifs de sécurité civile ont tendance à s’inscrire dans des approches cloisonnées, alors qu’ils sont finalement assez transverses notamment avec les dispositifs d’urbanisme et d’aménagement. Il est donc nécessaire de réfléchir et travailler les mesures de prévention et les mesures organisationnelles de gestion de crise de façon conjointe en interne, de la même façon que ce qui doit être réalisé à l’échelle du territoire tout entier.
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