> L’équilibre formel entre les parties prenantes n’est pas toujours respecté. Si les représentants des 5 collèges qui composent les CSS, nommés par le Préfet, sont censés valoriser les équilibres locaux, dans les faits les membres des administrations ou les experts se trouvent surreprésentés.
> Le manque de formation des représentants associatifs, qui n’ont pas toujours la culture technique nécessaire pour s’engager dans les débats. Ils ne bénéficient pas de formation, ni d’un budget autonome pour demander la réalisation d’études. Ils se trouvent donc de fait, souvent marginalisés.
En conclusion, le rapport souligne que ces instances sont, la plupart du temps, davantage des lieux d’information que de concertation. Pourtant, l’implication des riverains et des associations dans les politiques locales de prévention des risques industriels, à différents niveaux, présente des avantages. C’est un moyen de connaître les points de blocages potentiels, d’anticiper les problèmes à venir et d’envisager les différents points de vue sur les mesures à mettre en œuvre.
Dans le cadre de la mise en œuvre des PPRT, quelques collectivités se sont saisies de ce sujet et ont lancé leur propre dispositif de participation.
> 1er enjeu : sensibiliser les riverains au PPRT et les impliquer dans sa mise en œuvre
La CACEM a mis en place un comité de pilotage, composé de 5 collèges représentant l’ensemble des parties prenantes impliquées dans le dossier : industriels, services de l’État, collectivités, entreprises riveraines et habitants. Son rôle est de valider des propositions relatives aux différents axes de la mise en œuvre du PPRT : mesures foncières et de relogement, habitat et travaux chez les habitants, entreprises riveraines, aménagement. Les membres du comité de pilotage prennent part directement à la mise en oeuvre de ces 4 axes en participant aux différents comités techniques.
La CACEM a déployé une campagne de communication sur différents réseaux : envoi de courriers, diffusion de messages à la radio locale et organisation d’une réunion publique, qui a réuni plusieurs dizaines d’habitants. Lors d’une seconde réunion publique, les habitants ont été invités à élire leurs représentants au sein du COPIL. Deux titulaires et leurs suppléants ont été désignés.
> 2ème enjeu : dépasser les différences d’approches et de cultures, en donnant aux membres du COPIL des outils pour un travail en commun
Pour permettre un travail efficace du COPIL, il s’agissait de faire en sorte que les représentants des différents collèges échangent au préalable notamment sur leurs enjeux et leurs divergences de points de vue vis-à-vis du PPRT. A cette fin, la CACEM a organisé une session de formation à la concertation à destination des élus des différents collèges. Durant une journée, des ateliers et jeux de rôle leur ont permis d’apprendre à se connaître et de développer leur esprit d’équipe. Ces exercices doivent faciliter la prise de décision ultérieure.
Ces efforts ont payé : cette méthode a en effet été saluée par les riverains. Ceux-ci ont d’ailleurs organisé leur propre réunion d’échange à laquelle toutes les parties prenantes ont été invitées, et qui a été l’occasion de remercier la CACEM. Une inversion des rôles qui témoigne du succès de la démarche.
Monsieur Thouret, à quoi avez-vous participé dans le cadre de l’élaboration du PPRT ?
Nous avons fait partie du CLIC puis de la CSS et des personnes et organismes associés (POA). Mais nous sommes allés au-delà de ces instances « officielles ». Par exemple, nous avons participé à 15 réunions visant à écrire le règlement.
Aujourd’hui le PPRT de la ZIP du Havre est approuvé. Êtes-vous toujours mobilisés ? Si oui, pourquoi ?
Nous ne nous sommes pas relâchés car le plus difficile est devant nous. Ce n’était pas le moment de nous désinvestir ! L’élaboration du PPRT nous semble facile si on la compare à la phase de mise en œuvre. Aujourd’hui il faut réaliser des travaux dans 300 foyers, il faut que les habitants vivent en sécurité. Aux côtés des financeurs, l’association du quartier des Neiges et l’association des Côtes blanches font partie du comité de pilotage de la mise en œuvre du PPRT et des comités techniques traitant les questions d’habitat. Là, nous jouons notre rôle de porte-parole des habitants, c’est-à-dire que nous veillons principalement à deux choses : 1. la protection des habitants, 2. la prise en charge à 100% des travaux sans avance du crédit d’impôt.
Nous n’avons pas connaissance sur d’autres sites d’une telle implication de riverains dans la phase de mise en œuvre. A votre avis, à quoi tient-elle ?
La volonté du maire de Gonfreville-l’Orcher et des acteurs locaux a certainement joué pour beaucoup. Ils connaissent bien l’association des Neiges car notre implication sur cette thématique n’est pas nouvelle.
Elle remonte à l’année 1994. Le quartier des neiges venait d’être classé zone Seveso. Nous avons mobilisé les habitants et réussi, en 1996, à sortir le quartier des secteurs Seveso grâce à une réduction des risques chez l’industriel. J’ai alors appris qu’il fallait, pour être pris au sérieux, bien connaître les dossiers. C’est pourquoi, sur le PPRT, nous organisons une veille quotidienne sur Internet. Nous échangeons le plus souvent possible avec toutes les personnes susceptibles de nous donner des informations. Quand nous arrivons en réunion, nous en savons parfois plus que les autres parties prenantes.
AMARIS confirme… Notre association remercie Monsieur Thouret de lui faire bénéficier des résultats de la veille active qu’il effectue sur Internet. Nos échanges réguliers sont toujours instructifs. Grâce à la pugnacité de Monsieur Thouret, notre association n’a jamais pu oublier de chercher une solution pour modifier l’article 200 quater A du Code général des impôts afin d’appliquer le même plafond aux personnes seules qu’aux couples.
Faire vivre un espace autonome, représentatif des différents acteurs ; qualifier les nuisances et leur perception par la population ; transmettre et partager avec la population les connaissances : tels sont les objectifs de la conférence riveraine de Feyzin qui réunit, plusieurs fois par an, les 50 élus organisés en 3 collèges (habitants, élus de la ville et industriels).
3 groupes de travail ont été identifiés par les habitants : le PPRT, les nuisances et la communication. Autonome, et dotée d’un budget propre, la conférence riveraine peut solliciter les contributions d’experts afin d’approfondir des points sujets à discussion. Les avancées et points de questionnement sont finalement présentés, 4 fois par an, lors des assemblées plénières ouvertes à tous. Le fonctionnement général de la conférence est chapeauté par un secrétariat, qui assure la logistique et la communication. Les mandats de 3 ans doivent permettre aux différents élus de s’approprier le sujet et d’avoir le temps de mettre en œuvre des actions.
L’originalité de la conférence riveraine, instance du type unique en France, tient au fait que les citoyens ont été associés en première ligne pour définir le cadre de l’instance, les modalités de participation et de travail ainsi que les sujets abordés. L’instance a été entièrement co-construite par les parties prenantes. La gouvernance de la conférence riveraine est ainsi le fruit d’un cadre discuté et amendé. Animés par un intervenant externe, les débats se veulent équilibrés et doivent permettre à chacun de s’exprimer.
Si l’objet initial de la conférence riveraine était la mise en œuvre du PPRT, et concernait en priorité les habitants du quartier des Razes, le public et les sujets couverts par la conférence se sont progressivement élargis : tous les habitants de la ville sont aujourd’hui invités à y prendre part, et la conférence s’intéresse aussi aux questions du bruit et des nuisances industrielles. 10 ans après, quels résultats ? C’est l’enjeu de l’anniversaire de la 10ème année de la Conférence, organisé le 29 novembre.
- Vidéo de présentation de la Conférence riveraine réalisée par la ville de Feyzin
- Site internet de la Conférence riveraine